La passion de Jeanne d’Arc, de Dreyer

 

De la révélation divine au bûcher, l’histoire de Jeanne d’Arc est bien connue de tous. Mais à travers ce film muet de 1927, Carl Théodor Dreyer fait le choix de relater, non pas la fresque historique de cette courte vie, mais la période bien particulière du procès. 

Basé sur les pièces établies par les juges, documents parvenus par chance jusqu’à nous, on découvre alors, selon les propres mots du réalisateur, « une Jeanne telle qu’elle était, non pas avec casque et cuirasse, mais simplement humaine ». Le film est ainsi un face à face entre une femme tragique, animée par une passion religieuse fatale, et les représentants aveugles de l’Église.

Incarnée par Renée Falconetti, l’héroïne est filmée au plus près. L’utilisation des gros plans permet de saisir l’intimité d’un personnage songeur, presque absent. Mais ce sont aussi aussi les grimaces, les mimiques, les sourires moqueurs ou perfides des juges qui sont rendus par ce procédé. En outre, le recours aux contre-plongées, tantôt accentue le caractère oppressif de l’assemblée des juges, tantôt suggère l’état de grâce dans lequel se trouve Jeanne. La théâtralité de toutes ces figures est renforcée par le contraste vif que permet le noir et blanc. C’est ainsi une œuvre puissante que nous donne à voir le réalisateur, qui bouleverse tant par sa force émotionnelle que par sa plastique épurée.